Le C.A.U et le C.R.U
L’utilisation de l’engrais peut être appréciée par deux coefficients (Limaux, 1999):
- Le coefficient apparent d’utilisation (C.A.U.) correspondant au rapport entre le gain d’absorption d’azote lié à l’apport d’engrais et la dose d’engrais. La formule étant :
C.A.U. (%) = (Px – Po / X) x 100
où : Px (Kg/ha) = N absorbé par le peuplement à la dose X
Po (Kg/ha) = N absorbé par le peuplement en absence d’engrais
X (Kg/ha) = dose d’engrais apporté
- Le coefficient réel d’utilisation (C.R.U.) défini par la proportion de l’azote apporté par l’engrais et retrouvé dans le blé. Cette estimation s’applique aux études utilisant l’azote marqué 15N. La formule est :
C.R.U. (%) = (Px15N / X) x 100
où : Px15N (kg/ha) = quantité d’azote absorbé provenant de l’engrais 15N
X (kg/ha) = dose d’engrais azoté 15N apporté
Ces deux coefficients varient dans le même sens dans les différentes situations. Cependant, le (C.A.U.) est souvent largement supérieur au (C.R.U.) (Khelil, 2003). Cela signifie que dans l’évaluation du (C.A.U.), la différence entre la quantité d’azote exportée sur la parcelle fertilisée et celle présente dans la parcelle témoin est surestimée, en raison d’une interaction probable entre la fourniture de l’azote par le sol et l’engrais azoté qui y est ajouté. Quelques hypothèses peuvent être émises pour expliquer cette interaction (Khelil, 2003).
- Un meilleur développement racinaire des plantes fertilisées qui pourrait mieux explorer le sol.
- Une minéralisation nette plus grande dans les parcelles fertilisées qui pourrait conduire à une disponibilité plus grande de l’azote pour la plante.
- La substitution d’une proportion variable de l’azote minérale apporté par l’engrais au pool minéral du sol. Les microorganismes du sol s’alimentent en partie de l’azote minéral apporté et diminuent leur consommation d’azote du sol. L’engrais subirait le processus d’organisation, en échange d’une quantité équivalente d’azote natif. L’apport d’engrais rend donc disponible pour les plantes un peu plus d’azote du sol.
Contrairement au C.R.U., le C.A.U. prend en compte ces effets d’interaction. L’intérêt du C.R.U. utilisant le traceur 15N est surtout permettre de suivre le devenir de l’engrais azoté lorsqu’il n’est pas absorbé par les plantes (organisation microbienne, lessivage, pertes gazeuses).
Les variations des coefficients d’utilisation de l’azote
Les premiers résultats concernant les variations du coefficient d’utilisation de l’engrais au cours du cycle du blé ont été obtenus dans les années 80 à l’aide du traceur 15N. Recous (1983), observe que le coefficient réel d’utilisation de l’engrais azoté est plus élevé pour les apports tardifs (après le début montaison) que pour ceux précoces. Destain, (1997) et Destain et Bodson (2003), ont montré que le (C.R.U.) de l’apport azoté appliqué au stade de redressement s’élève à 60%. Ce pourcentage augmente à 75% pour l’apport azoté appliqué au stade dernière feuille. Plas (1992) obtient des résultats convergents en mesurant le (C.A.U.) qui passe de 70 % en moyenne pour le premier apport effectué fin janvier à 90% pour le second appliqué fin février ou début mars, avant le stade « épi 1 cm ». Ces résultats sont confirmés par Limaux (1994) qui a obtenu un (C.A.U.) de 60 % pour le premier apport et de 90% pour le second.
Les raisons de la différence d’utilisation de l’engrais selon les apports restaient mal connues. Les modèles de lessivage montrent que, dans la grande majorité des cas, l’engrais apporté en «sortie d’hiver» n’est pas entraîné hors de porté des racines, et les microorganismes du sol organisent une partie de l’azote de l’engrais (18 à 32 %). Des travaux menés par Limaux (1994) et Limaux et al., (1998) montrent une relation positive entre le CAU de l’engrais azoté et la vitesse de croissance de la culture au moment de l’apport (un C.A.U. de 80 % serait atteint avec une biomasse de l’ordre de 120 g /m2, alors qu’une biomasse de 20 g / m2 ne conduirait qu’à un C.A.U. de 40 %).
Toutes les variations de l’utilisation de l’engrais se déroulent dans les 10 – 15 jours qui suivent l’apport d’engrais (Recous et al., 1997). On peut penser que lorsque la vitesse d’absorption est élevée, l’azote de l’engrais reste peu de temps dans le sol, ce qui réduit les risques de pertes. Au contraire, pour des vitesse de croissance faibles, l’engrais reste longtemps dans le sol sans être absorbé par le peuplement, et la concentration de la solution du sol en ammonium ou en nitrates reste plus élevée, ce qui est favorable au déclenchement des phénomènes de lixiviation, organisation et pertes par voies gazeuses (Recous et Machet, 1999). Ainsi, un sol qui est engorgé d’eau pendant quelques jours après un apport azoté, favorise la dénitrification et défavorise la croissance, ce qui peut expliquer des C.A.U. faibles. La volatilisation de l’ammoniac est également une cause de diminution du coefficient d’utilisation de l’engrais (Recous et Machet, 1999). Toutefois, lorsque les peuplements sont denses, ils modifient le microclimat à la surface du sol. Ainsi, la vitesse du vent par exemple se trouve atténuée et par conséquent les pertes d’azote par volatilisation se réduisent.
D’autres mécanismes permettent d’expliquer la réduction des pertes sur les peuplements à forte vitesse de croissance. Une partie de l’ammoniac volatilisée pourrait être récupérée par absorption foliaire, dont l’efficacité pourrait dépendre de la vitesse de croissance.
Sur le plan pratique, l’azote doit être fractionné et apporté à un moment où le la culture présente une vitesse de croissance élevée, tout en évitant l’apparition préalable de fortes carences préjudiciables à certaines composantes du rendement (nombre d’épis et de grains).
Source:
Mme FERTAS Khadra 2007 . Essais d’optimisation du fractionnement et de la période d’apport de l’azote pour la culture du blé dur ( variété waha ) en zone semi – aride irriguée.