1- Généralités
L’inuline est un polysaccharide linéaire qui contient des résidus de fructose liés par des liaisons O-glycosidiques en β (2→1), souvent avec une molécule de glucose à l’extrémité de chacune de chaînes de fructose, attaché par une liaison α (1-2), comme montré dans la figure 1. Le degré de polymérisation de l’inuline varie entre 2 et 70 unités fructose en fonction des conditions climatiques (Waterhouse et Chatterton, 1993).
L’inuline est présent dans les racines, les tubercules, les grains et les parties de la tige de certaines plantes (Van Laere et Van den Ende, 2002; Ritsema et Smeekens, 2003). Dans les monocotylédones, l’inuline est largement présents dans les herbes (Gramineae) (Ritsema et Smeekens, 2003) et les Liliaceae, comme, l’ail, l’oignon, le poireau, etc. (Shiomi, 1989). Par ailleurs, l’inuline dans les dicotylédones est présent à une teneur élevée dans les (Asteraceae), incluant, la chicorée, le topinambour, l’artichaut, et autres (Shiomi, 1989 ; Wilson et al., 2004, Orthen et Wehrmeyer, 2004 ; Shiomi et al., 2006). L’ensemble de plantes contenant de l’inuline sont résumées dans le tableau 1
Tableau 1 Plantes riches en inulines (Singh, 2010)
Nom botanique |
Nom commun |
Parties riches en inuline (% matière sèche) |
Agave americana | Agave américain | lobes 7–10 |
Allium cepa | Oignon | bulbe 2–6 |
Allium sativum | Ail | bulbe 9–16 |
Arctium sp. | Bardanes | racines 3.5–4 |
Asparagus officinalis | Safed Musli / shatavari | racines tubercules 10–15 |
Asparagus racemosus | Safed Musli / shatavari | racines tubercules 12–22 |
Cichorium intybus | Chicorée | racines 3–10 |
Cynara cardunculus | Artichaut | feuilles 15–20 |
Dahlia sp. | Dahlia | racines tubercules 14–19 |
Helianthus tuberosus | Artichaut de Jérusalem | tubercules 0.5–1.5 |
Hordeum vulgare | Orge | grains 8–13 |
Smallanthus sonchifolius | Poire de terre | feuilles 12–15 |
Taraxacum officinale | Pissenlit | racines 15–20 |
Scorzonera hispanica | Spanish salsify | racines 18–20 |
Saussurea lappa | Saussurea | racines 7–10 |
2- Enzymes de dégradation d’inuline
La dégradation des fructanes est réalisée par des enzymes de type fructane exohydrolases (FEHs, EC 3.2.1.80). Ces dernières sont des glycoprotéines solubles appartenant à la famille 32 des glycosides hydrolases (GH 32), enzymes qui catalysent l’hydrolyse des liaisons O- des glycosides, produisant un sucre hemiacetal avec son aglycone correspondant, comme mentionné dans la figure 2 (Ritsema et Smeekens, 2003).
En fonction du site d’hydrolyse, les glycosides hydrolases sont classés dans le groupe des exo-hydrolases ou des endo-hydrolases (figure 3).
Les exo-inulinase et les endo-inulinases (E.C. 3.2.1.80 et E.C. 3.2.1.7) appartiennent à la famille des glycosides hydrolases. Elles sont responsables de l’hydrolyse des fructanes et elles sont, également, nommées fructanases.
2.1- Endo-inulinase
L’endo-inulinase est spécifique à l’inuline et hydrolyse les liens internes β-(2,1) fructofurannosidique (figure 4) pour donner des inulotriose, inulotetraose et inulopentaose comme produits principaux (Kim et al., 1999)
2.2- Exo-inulinase
L’exo-inulinase quant à elle, libère les unités de fructose terminales dans l’inuline (figure 4) (Vandamme et Deryeke, 1983 ; Ritsema et Smeekens, 2003).
3- Principales sources microbienne d’inulinase
L’inulinase est généralement thermostable et commercialement disponible pour des applications industrielles (Ettalibi et Baratti, 2001). Dans les dernières décennies, un grand nombre de champignons, de levures et de souches bactériennes ont été utilisés pour sa production (tableau 2).
Tableau 4 : Principales sources microbiennes d’inulinase
Sources | Types d’inulinase | Références | |
Champignons |
Aspergillus awamori | Exoinulinase | Arand et al., (2002) |
Aspergillus ficuum | Endoinulinase | Uhm et al., (1998) | |
Aspergillus fumigatus | Endoinulinase | Ongen et al., (1996) | |
Aspergillus niger | Endoinulinase | Ohta et al., (1998) | |
Aspergillus oryzae | Exoinulinase | Gupta et al., (1998) | |
Aspergillus versicolor | Exoinulinase | Kochhar et al., (1997) | |
Chrysosporium pannorum | Exoinulinase | Xiao et al., (1989) | |
Fusarium oxysporum | Exoinulinase | Gupta et al., (1992) | |
Panaeolus papillonaceus | Exoinulinase | Mukherjee et Sengupta, (1987) | |
Penicillium purpurogenum | Endoinulinase | Onodera et al., (1996) | |
Penicillium sp. TN-88 | Exoinulinase | Moriyama et al., (2002) | |
Scytalidium acidophilum | Exoinulinase | Kim et al., (1994) | |
Levures |
Kluyveromyces cicerisporus | Exoinulinase | Zhang et al., (2012) |
Kluyveromyces fragilis | Exoinulinase | Workman et Day, (1983) | |
Kluyveromyces marxianus var. bulgaricus | Exoinulinase | Bergkamp et al., (1993) | |
Kluyveromyces sp Y-85 | Exoinulinase | Parekh et Margaritis, (1985) | |
Bactéries |
Arthrobacter sp. S37 | Endoinulinase | Kang et Kim, (1999) |
Bacillus licheniformis | Exoinulinase | Rey et al., (2004) | |
Bacillus polyxyma MGL21 | Exoinulinase | Kwon et al., (2003) | |
Bacillus sp. Snu7 | Exoinulinase | Uzunova et al., (2002) | |
Bacillus stearothermophilus | Exoinulinase | Kato et al., (1999) | |
Bacillus subtilis | Exoinulinase | Vullo et al., (1991) | |
Bifidobacterium longum | Exoinulinase | Schell et al., (2002) | |
Clostridium acetobutylicum | Exoinulinase | Looten et al., (1987) | |
Cryptococcus aureus | Exoinulinase | Sheng et al., (2008) | |
Geobacillus stearothermophilus | Exoinulinase | Tsujimoto et al., (2003) | |
Pseudomonas mucidolens | Endoinulinase | Yun et al., (1997) | |
Xanthomonas oryzae | Exoinulinase | Cho et Yun, (2002) |
4- Voie de dégradation de l’inuline
Le mécanisme moléculaire de la réaction d’hydrolyse des glycosides hydrolases est décrit dans la figure 5 avec l’exemple de l’exo-inulinase d’Aspergillus awamari (Nagem et al., 2004). Au cours d’une première étape, le nucléophile attaque le carbone C2 du résidu fructosyl terminal. Un intermédiaire covalent de type fructosyl-enzyme est formé et une molécule d’aglycone est libérée dans le milieu. Lors de la seconde étape, le résidu acide/base déprotoné joue le rôle de base pour activer une molécule d’eau venant attaquer l’intermédiaire fructosyl enzyme. La liaison fructosyl-enzyme intermédiaire se rompt et libère la molécule de fructose.
L’exo-inulinase d’Aspergillus awamori a été cristallisée et la reconnaissance du substrat est caractérisée. Deux acides aminés, l’acide aspartique 41 et l’acide glutamique 214 du site actif de la protéine fonctionnent comme le nucléophile et le catalyseur acide/base respectivement (Nagem et al., 2004). Pour la majorité des glycoside-hydrolases, les acides aminés glutamiques et aspartiques sont communément trouvés au niveau du site actif.