1 – Origine et distribution géographique
Les agrumes sont originaires du Sud-Est asiatique (De Rocca Serra & Ollitrault, 1992).
Cependant, les données historiques plaident en faveur de l’existence de trois centres de diversification primaire (Webber, 1967 ; Scora, 1988) :
– Le Nord-Est de l’Inde, les régions proches de la Birmanie et de la Chine, auraient abrité la diversification de C. medica et l’apparition de C. aurantifolia, C. limon, C. aurantium et C. sinensis ;
– La Malaisie et l’Indonésie sont citées comme centre d’origine de C. grandis.
– le Vietnam, le Sud de la Chine et le Japon seraient la zone de diversification de C. reticulata (Anonyme, 1998).
La diffusion des agrumes à travers le Monde s’est faite très lentement. Le cédratier a été la première espèce connue en Europe (300 ans av. J.-C. d’après Webber, 1967). Le bigaradier, le citronnier et l’oranger ont été introduits dans le bassin méditerranéen vers la moitié du XIIe siècle, et le mandarinier au XIXe siècle. Le bassin méditerranéen constitue à présent une importante zone de production pour ces trois dernières espèces. L’introduction des agrumes en Afrique de l’Est a été faite par les commerçants arabes et hindous vers le XIVème siècle.
La diffusion vers le bassin du Congo a été assurée par la suite par les explorateurs portugais (Spiegel-Roy & Goldschmidt, 1996).
2 – Taxonomie
Les agrumes appartiennent à trois genres botaniques : Citrus, Fortunella et Poncirus (De Rocca Serra & Ollitrault, 1992 ; Spiegel-Roy & Goldschmidt, 1996; Anonyme 1998). Ceux-ci forment avec 10 autres genres (Atalantia, Burkillanthus, Citropsis, Clymenia, Eremocitrus, Hespertusa, Limnocitrus, Microcitrus, Pleiospermium et Severinia) la sous-tribu des Citrinae (Anonyme 2001a). Cette sous-tribu appartient à la tribu des Citreae, sous-famille des Aurantioideae dans la famille des Rutacées.
Le genre Citrus renferme la plupart des agrumes cultivés pour leurs fruits ou leurs huiles essentielles. Deux classifications du genre prévalent. Celle de Tanaka (1961) identifie 156 espèces, tandis que celle de Swingle et Reece (1967) n’en distingue que 16 espèces. En référence à cette dernière classification, les huit espèces cultivées sont : C. sinensis (L.) Osb., l’oranger ; C. aurantium L., le bigaradier; C. reticulata Blanco, le mandarinier ; C. paradisi Macf., le pomelo ; C. maxima (Burn.) Merr., le pamplemoussier ; C. limon (L.) Burm., le citronnier ; C. aurantifolia (Christm.) Swing., le limettier et C. medica L., le cédratier. Ces espèces renferment un grand nombre de variétés.
Certaines études répartissent ces 8 espèces d’importance économique dans 3 grands groupes en fonction des similarités génétiques. Il s’agit du groupe des orangers et mandariniers, du groupe des pomélos et pamplemoussiers et du groupe des limes et citronniers (Luro et al, 2001). D’autres travaux plus récents sur la diversité génétique et la structure des populations des agrumes penchent plutôt en faveur de l’existence de 3 espèces « ancestrales » d’agrumes.
Il s’agit du bigaradier (C. medica), du pamplemoussier (C. maxima) et du mandarinier (C. reticulata). Ces espèces seraient à l’origine de nombreuses espèces comptabilisées de nos jours, qui en réalité sont des hybrides issus de croisement entre les premières espèces (Barkley et al, 2006).
3 – Ecologie et phénologie des agrumes
3.1 – Ecologie
Les agrumes présentent une grande capacité d’adaptation à des conditions pédoclimatiques très différentes. La culture des agrumes est possible partout où la température moyenne de l’année est supérieure à 13°C et inférieure à 39°C. Les agrumes préfèrent les climats maritimes des zones subtropicales. En terme de besoins en eau, 120 mm par mois, soit 1200 à 1500 mm par an, représentent une quantité d’eau au-dessous de laquelle la culture des agrumes nécessite une irrigation (Anonyme, 2006).
La lumière a une action très remarquée sur la qualité et la coloration des fruits. Les arbres fruitiers sont plus exigeants sur les caractéristiques physiques du sol et non sur les caractéristiques chimiques qui peuvent être corrigées par des apports d’engrais et d’amendements. Les sols doivent être profonds et de préférence légers (sablo-argileux ou argilo-sableux), bien drainés. Les agrumes redoutent les eaux salines (au-dessus de 0,5%). Le pH idéal est situé entre 5,5 et 7,5 (Walali Loudyi et al, 2003 ; Van Ee, 2005). C’est à cet effet que le choix du porte-greffe est un des facteurs essentiels de réussite car il peut conférer à la plante une tolérance à des maladies et à des contraintes abiotiques (salinité, pH, froid, sécheresse, calcaire…). L’optimum d’altitude pour un bon développement des agrumes se situe entre 1000 et 1300 m car ces derniers ne doivent pas être trop exposés aux vents.
Loussert (1989) signale qu’au-dessous de 800 m, les fruits manquent de saveur. La peau des oranges reste verte, les cloisons deviennent plus épaisses.
3.2 – Phénologie
Le développement de la frondaison des agrumes se fait sous forme de flux végétatif ou poussée foliaire (flush). Ces flux végétatifs succèdent à des périodes d’arrêt végétatif. Ce phénomène s’observe même en climat tropical humide où les conditions permettent une activité végétative continue (Praloran, 1971). Il existe généralement 3 flux végétatifs par an.
Ils commencent avec le début des pluies. Le premier flux, qui est de loin le plus important (longueur et nombre de rameaux émis), débute en mars avec le retour des pluies. Le second se fait au mois d’août, il est également déclenché par le retour des pluies. Le dernier survient en octobre.
La floraison se produit en même temps que la pousse qui suit le repos végétatif. Les fleurs sont isolées ou en grappes et se forment sur le bois de l’année précedente (Praloran 1971 ; Menino et al, 2003). La floraison est continue tout au long de l’année sur les citronniers et limettiers. Sur les autres espèces on peut avoir une ou 2 périodes de floraisons par an. Sur un même arbre, on peut ainsi retrouver des feuilles, des fleurs et des fruits de différents âges (Van Ee, 2005). Dans la zone forestière humide du Cameroun, deux principales périodes de floraison sont observées. La première a lieu entre mars et juin et la seconde de septembre à décembre (Kuate et al, 1992).
4 – Production des agrumes dans le monde
Les productions d’agrumes proviennent essentiellement des régions méditerranéennes et tropicales. En 1988, la superficie totale plantée en agrumes a été évaluée à plus de 3 millions d’hectares répartie sur une aire très large située approximativement entre les 40° de latitudes Nord et Sud tout autour du Monde (Anonyme, 2004 ; Polese, 2008).
Les agrumes sont donc de nos jours implantés dans toutes les zones du monde où leur production est possible. Les pays producteurs forment une ceinture terrestre entre le 40ème parallèle nord et sud (Figure 1.1).
Initialement les Etats-Unis et la zone méditerranéenne produisaient les plus grandes quantités.
La production s’est ensuite développée au Brésil et en Asie (Griffon & Loeillet, 2000).
Actuellement, l’agrumiculture occupe une place importante en Afrique en général et enAfrique tropicale en particulier. Huit pays africains (Nigéria, Guinée Conakry, Tunisie, Sierra Léone, Kenya, Angola, Tanzanie, Côte d’Ivoire) figurent dans la liste des 20 plus grands producteurs mondiaux des petits agrumes.
La production annuelle mondiale a dépassé 105 millions de tonnes dans la période 2000-2004 (Anonyme, 2004). Les agrumes sont commercialisés soit en fruits frais, soit transformés (jus de fruits, liqueurs, confitures etc…). La figure 1.2 présente la répartition géographique de la production d’agrumes destinés au marché de fruits frais dans la période 2000-2004.
Les huiles essentielles d’agrumes représentent également un des produits commercialisés à haute valeur ajoutée. Elles sont extraites de fleurs, d’écorces, de feuilles et de fruits.
Actuellement, la production mondiale d’agrumes est de l’ordre de 122 millions de tonnes.
C’est la deuxième production fruitière derrière le groupe des bananes et plantains (125 millions de tonnes) loin devant la pomme (70 millions de tonnes) (Loeillet 2010).
Les productions d’agrumes sont réparties en 4 groupes par la FAO. Il s’agit du groupe des oranges, de celui des pamplemousses et pomélos, du groupe des citrons et limes et de celui des petits agrumes qui regroupe les autres espèces commercialisées. Les oranges constituent la majeure partie de la production des agrumes (58%) suivi des citrons avec plus de 10%.
Le reste de la production est partagé entre les pamplemousses, les pomélos et les autres petits agrumes (mandarines, tangelos, tangors). Dans le groupe des oranges, les cinq plus grands producteurs mondiaux en 2009 sont le Brésil (1 7 618 500 tonnes), les Etats-Unis (8 280 780 tonnes), l’Inde (5 201 350 tonnes), la Chine (4 864 959 tonnes) et le Mexique (4 193 480 tonnes). Dans celui des pamplemousses et pomélos, les cinq premiers producteurs sont la Chine (2 768 308 tonnes), les Etats-Unis (1 182 970 tonnes), le Mexique (395 000 tonnes), l’Afrique du sud (370 411 tonnes) et Israël (249 414 tonnes). Dans le groupe des limes et citrons, l’Inde (2 571 530 tonnes), le Mexique (1 987 450 tonnes), la Chine (1 014 446 tonnes), l’Argentine (1 000 000 tonnes) et le Brésil (972 437 tonnes) sont les cinq premiers pays producteurs. Dans le groupe des petits agrumes, la Chine est le premier pays producteur avec 4 694 471 tonnes. Elle est suivie du Nigéria (3 769 420 tonnes), de la Colombie (732 218
tonnes) et de la Guinée Conakry (244 002 tonnes) (FAOSTAT, 2011). Dans la majorité des pays d’Afrique tropicale, les agrumes sont plantés soit par des petits producteurs, soit par des entreprises privées ou gouvernementales pour la consommation locale ou l’exportation (Yesuf, 2002).