1. Généralité :
L’huile essentielle, essence ou également appelé huile volatile, est l’ensemble d’extraits volatils de composition complexe obtenu des plantes aromatiques. D’après l’association Française de normalisation (AFNOR., Edition 2000), a défini les huiles essentielles comme étant : des produits obtenus soit à partir de matières premières naturelles par distillation à l’eau ou à la vapeur d’eau, soit à partir des fruits de citrus par des procédés mécaniques et qui sont séparés de la phase aqueuse par des procédés physiques.
L’odeur et la volatilité des essences contribuent dans les interactions entre les végétaux également entre végétale et l’animal ou elles constituent un moyen de défense avec son action répulsive contre les prédateurs (micro-organismes, champignons, bactéries, animaux herbivores).Elles peuvent également participer à l’attraction des insectes pollinisateurs.
2. Origine et localisation des HEs :
Les huiles volatiles peuvent êtres considérés comme des résidus du métabolisme végétal. Suite à la photosynthèse au niveau des chloroplastes, l’énergie produite (sous forme de glucides, NADPH et d’ATP) contribue au développement de la plante et indirectement à la biosynthèse de multiples composés secondaires parmi elles les huiles essentielles ( Narishetty et Panchagnula.,2004)
Les huiles sont synthétisées par les végétaux supérieurs, il y aurait environ 17500espèces aromatiques réparties dans une cinquantaine de familles dont les lameaceae, les asteraceae, les rutaceae. Ces espèces sont caractérisées par la présence d’organes spécifiques responsables de la synthèse et de stockage des huiles essentielles :les poches (Myrtaceaes,Rutaceaes) ou les canaux sécréteurs, les poils sécréteurs ( lamiaceae) et les cellules sécrétrices ( Zingiberaceae, Lauraceae) (Bruneton., 1993).L’accumulation des HEs peut etre dans toutes les parties de la plante : sommités fleuries( lavande), écorces ( cannelier), rhizomes ( Ginggembre), fruits ( Anis)….etc.
3. Propriétés physico-chimiques :
Les propriétés physiques des huiles essentielles se résument en leurs indices, pouvoir rotatoire, viscosité, densité, solubilité dans l’alcool, point d’ébullition et congélation.
Généralement incolores ou jaune pâle, les essences sont liquides à température ambiante .la nature huileuse des HEs, la rend liposoluble ainsi elles sont peu solubles dans l’eau mais le sont dans les solvants organiques apolaires, les huiles grasses, et dans les alcools.
Les huiles essentielles sont extrêmement volatiles et sensibles à l’oxydation. Elles ont tendance à se polymérisées en donnant lieu à la formation de produits résineux ce qui induit à la perte de ses propriétés.
Leur densité est en générale inférieure à celle de l’eau (à l’exception des huiles essentielles de sassfras, de girofle ou de cannelle constituent des exceptions).Elles ont un indice de réfraction élevé et la plupart devient a la lumière polarisée (Baser et Buchbauer., 2010).
4. Composition chimiques des HEs :
Les huiles essentielles peuvent contenir une centaine de composés différentes, appartenant à deux groupes caractérisés par des origines biogénétiques spécifiques : les terpènes et les dérivés des phénylpropane biosynthétisé essentiellement à partir de l’acide shikimique (Bruneton., 1993).
4.1. Les terpènes :
Les huiles essentielles sont constituées d’un certains nombre de composés terpéniques, généralement les plus volatiles dont la masse moléculaire n’est pas élevée. Ces constituants proviennent de l’isoprène répondant à la formule générale (C5H8) n, ils sont également nommés isoprénoides ou terpénoides .Le terme « terpénoide » définit l’ensemble des terpénes oxygénés,alors que le terme « terpéne » ne tient pas compte de la présence d’oxygène(Baser et Buchbauer.,2010).
Ainsi, on distingue selon le nombre de carbone : les monoterpénes (C 10), les sesquiterpénes (C15), et moins fréquemment les diterpénes (C20), les triterpénes (C30) et les tétraterpénes (C40).
Certains composés terpéniques peuvent êtres toxiques, répulsives ou attractifs pour d’autres organismes, d’où leurs roles dans les interactions entre les plantes et animaux.
4.2. Monoterpènes :
On y rencontre des monoterpénes acycliques ( myrcéne, ocimène) ,monocycliques ou bicycliques ( pinénes,3-caréne,camphéne, sabinéne).Grace à la réactivité des cations intermédiaires de ces terpénes , elles peuvent se rattacher à un certain nombre de molécules (Bruneton., 2008).
4.3. Sesquiterpènes :
L’allongement de la chaine des sesquiterpènes amplifie le nombre des cyclisations possible, plus d’une centaine de squelettes différents ont étés décrits. On trouvera également des sesquiterpènes avec des fonctions chimiques caractéristiques : alcool ( farnésol,carotol ),carbures ( β-caryophyllène), cétones, ester.
4.4 Composés aromatiques ES:
Les dérivés du phénylpropane (C6-C3), ou composés phénoliques s’agissant le plus fréquemment d’allyl ou propénylphénols,et ou aldéhydes. La biosynthèse par voie phénylpropanoides débute par des aromatiques qui sont la phénylalanine et la tyrosine, ils sont généralemen caractérisés par la présence d’un groupement hydroxyle fixé à un cycle phényle. Egalement, la synthèse de ces constituants nécessite une série d’acides dont l’acide shikimique et l’acide cinnamique .les phénylpropanoides sont moins répondu dans l’HEs que les terpénes, néanmoins elles sont caractéristiques dans certaines huiles essentielles d’Apiaceae (anis, fenouil, cannelles (eugénol,myristicine,asarones,cinnamaldéhyde)) (Bruneton.,1999).
5. Activité biologique des huiles essentielles :
5.1. Activité antioxydant :
Les antioxydants sont des substances capables de protéger l’organisme contre les effets du stress oxydatif ( Beirao &Bernardro-Gil .,2006).
On distingue trois types d’antioxydants enzymatiques, les enzymes de réparation, et les antioxydants non enzymatiques, les substances naturelles dont les huiles essentielles sont classées entant qu’antioxydants non enzymatiques.
L’activité antioxydante peut être primaire ou préventive (indirecte), cette dernière est capable de retarder l’oxydation par des mécanismes indirects tels que la réduction d’oxygène (Mdhavi et al., 1996).
Par contre les antioxydants à réaction directe sont capables de donner des électrons d’oxygène radicalaire afin qu’il puissent le piéger, empêchant ainsi la destruction des structures biologiques .Ils peuvent agir comme agents réducteurs capable de passer leurs électron aux ROS et les éliminer ( Kohen et Nyska.,2002).
Quelques travaux ont rapporté que certaines huiles essentielles sont plus efficaces que les antioxydants synthétiques (Hussain et al ., 2010).Les effets antioxydants d’huiles essentielles et d’extraits des plantes sont dus principalement à la présence des groupes d’hydroxyle dans leur structure chimique (Hussain ., 2009).
5.2. Activité antibactérienne :
L’une des premières mises en évidence in vitro de l’activité antibactérienne des HEs date de la fin du XIXème siècle, lorsque Buchholtz a étudié la croissance des propriétés inhibitrices de l’huile des graines de carvi et de thym en 1875. Toutefois, il aura fallu attendre le début du XXème siècle pour que les scientifiques commencent à s’y intéressé (Cox et al., 2000).Des lors, plusieurs recherches ont démontré le pouvoir antimicrobien de certaines essences sur une large palette de micro-organismes, y compris sur des bactéries résistantes aux antibiotiques.
Néanmoins, le mécanisme d’action des HEs sur les cellules bactériennes et fongiques reste difficile à cerner, compte tenu de la composition complexe des huiles volatiles (Burt., 2004).La variabilité des constituants des huiles suggere qu’elles agissent sur plusieurs sites d’action dans les micro-organismes, étant donné que chaque composé possède son propre mode d’action (Guinoiseau., 2010).
Les caractéristiques des huiles sont attribuées aux dérivés terpénoides et phynilpropanoides dont elles sont constituées. L’activité de ces molécules bioactives dépend, à la fois des caractères lipophile de leur squelette hydrocarboné et du caractère hydrophile de leurs groupement fonctionnels. Les molécules oxygénées sont généralement plus actives que les membranes de la cellule bactérienne et induire sa rupture. Le contenu cytoplasmique est déchargé à l’extérieur de la cellule impliquant sa destruction (Wendakoon et Sakaguchi., 1995 ;Tsuchiya et al.,1996) . Egalement, une perturbation chémo-osmotique et une fuite de potassium intra-cytoplasmique peuvent subvenir, suivi de la libération d’acides nucléiques, de l’ATP,et du phosphate inorganique ( Tsuchiya et al.,2011).
D’après Masson et Wasserman (1987), les composés phénoliques et les aldéhydes possèdent un mécanisme similaire, avec une efficacité inhibitrice proportionnelle de la membrane Des micro-organismes comme l’enzyme ATPas, soit par action directe sur la partie hydrophobe de la protéine, soit en interférant dans la translocation des protons dans la membrane prévenant la phosphorylation de l’ADP (Kurita et al., 1989).
La synthèse de l’ADN, l’ARN,des protéines et des polysaccharides peuvent être inhibés par les huiles essentielles (Johensen et al., 1997).
5.3. Activité antifongique
De plus en plus, les essences sont utilisées dans l’industrie agro-alimentaire comme aromes également comme conservateurs alimentaires. Les huiles essentielles agissent sur un large spectre de moisissure et de levure en inhibant la croissance des levures et la germination des spores, l’élongation du mycélium, la sporulation et la production de toxines chez les moisissures.
Comme pour l’activité antibactérienne, le pouvoir antifongique est attribué à la présence de certaines fonctions chimiques dans la composition des HEs. Plusieurs travaux ont révélé que le pouvoir inhibiteur était essentiellement dû à la réactivité de la fonction aldéhyde avec le groupement thiol des acides aminés impliqués dans la division cellulaire (Kurita et al ., 1979).
D’autres auteurs ont démontré que la formation d’un complexe entre le donneur
D’électrons et l’aldéhyde induit un changement de l’état ionique de la membrane traduisant Par un déséquilibre d’échange avec le milieu extérieur. Ce déséquilibre entraîne la mort Cellulaire (Baser et Buchbauer., 2010).
Cependant, les phénols (eugénol, chavicol 4-allyl-2-6- diméthoxyphénol) sont plus Antifongiques que les aldéhydes testés (cinnamique et hydro cinnamique) (Laib., 2010).
6. Toxicité des huiles essentielles
Certains constituants aromatiques des HEs possèdent de multiples vertus, cependant elles peuvent présenter une toxicité à très forte dose (essentiellement les cétones mono Terpéniques) ; suivant la citation de Pracelse : « Tout est poison, rien n’est poison, seule la dose compte ». Généralement, les huiles essentielles ingérées par voie orale ont une toxicité aiguë faible (Tableau 01).
Ainsi l’ingestion massive peut conduire à une neurotoxicité issue des HEs à thyone (Thuya, absinthe, sauge) ou à pinocamphone. Ces cétones peuvent provoquer des crises épileptifomes et tétaniformes, des troubles sensoriels.
Tableau n°2 : Dose létale de quelque huile essentielle (Bruneton., 1999)
Plantes | DL50 |
Anis, Eucalyptus, Girofle | 2 à 5 g/kg |
Camomille, Citronnelle, Lavande, Marjolaine | <5 g/kg |
Basilic, Estragon, Hysope | 1 à 2 g/kg |
Origan | 1,5ml/kg |
Sassafras | 1,9 g/kg |
Wintergreen | 0,9 à 1,25 g/kg |
7. Situation économique des huiles essentielles
Les huiles volatiles sont des matières premières importantes pour la parfumerie, le cosmétique, l’industrie des arômes. Ces substances sont également utilisées dans l’industrie pharmaceutique aussi bien comme sources de substances actives que pour l’aromatisation de divers produits (Moretti et al., 2002).
La production des HEs produites dans le monde varie considérablement, annuellement elles peuvent dépasser 35 000 tonnes tandis que d’autres ne peuvent atteindre que quelques kilogrammes (Baser et Buchbauer., 2010). Cette variabilité de production revient essentiellement à la disponibilité des plantes. Egalement, la production est très limitée quasi impossible dans les pays nordiques couverts de neige en permanence. Chaque région possède ses propres flores caractéristiques. Quelques plantes peuvent être endémiques, se limitant à une zone particulière telle que Santalum album en Inde et au Timor en Indonésie, Pinus mugo dans les Alpes européennes, Thymus numidicus dans le Maghreb.
Les principaux pays producteurs d’HE en Afrique sont l’Algérie, le Maroc, la Tunisie, l’Egypte et la Côte d’Ivoire. En Europe ce sont les pays méditerranéens : Italie, Espagne, Portugal, France, Croatie, Albanie et Grèce, qui produisent tous des huiles essentielles en quantités industrielles. Egalement les pays d’Europe centrale et de l’Est, tels que la Bulgarie, la Roumanie, la Hongrie et l’Ukraine, l’immense Fédération de Russie.
Ces derniers jouissent d’une ressource de plantes sauvages importante grâce à leurs vastes zones de terres cultivées.
En Asie, la diversité du climat permet une production d’HEs importante.
La Chine et l’Inde jouent un rôle majeur suivies de l’Indonésie, le Sri Lanka et le Vietnam (Baser et Buchbauer., 2010).
Source:
BOULEZAZEN, Abd Elmoumen 2017. Evaluation de l’activité antioxydante et antimicrobienne d’une plante aromatique (Rosmarinus Officinalis L.) de la forêt Béni Melloul –Khenchela.
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